Écrits

Transit, 2024

Voilà qu’un jour petite chierie de longue haleine vint me saluer depuis un seul menu couloir et me dire : Éteins ta lampe pour mieux fouler la nuit. Va. Face contre terre. Débris dévisagés. Troubles fauchés déconcertés. Viens te mettre à volonté la tête dedans le noir. Va te faire miroir flou. Sur le cul. Fameux cul d’or bordé d’abord de nouilles et qui a trop mangé. Baisse les bras pour voir. Sois le caillou qui respire. Sois le creux qui se forme. L’enfin réceptacle de quelque chose de franc. Par la peau et sans honte empoigne le risque. Risque toi. Sois la rage. Sois le chagrin remorqué. Ni cœur clos ni monde mort. Sois l’humaine qui peut d’un geste redevenir le nourrisson blessé. Regoûter dans ta chair les périlleuses batailles. Extrêmes nécessités d’un ancêtre habité. D’accord d’accord d’accord. Surtout ne pas faire mine. Ne pas me taire. Absorber cette soif ahurie de nous voir de face et de front. De fêlure en fêlure toucher l’abysse. Point de départ des armures. Me désarmer. Oser ma coulisse et mes terrains glissants. Me planter. Me ramasser. Défoncer la porte. Dégommer l’appoint. Nord sud est ouest. Du sens est arrivé de loin là bas dans mon paysage et ma montre est prête à tous les revers. Dis nuit, derrière les gravas, y a t-il encore le compost qui fume ? Et les astres qui bougent ? Et les artères pleines d’air ? Les choses plus grandes, les choses plus grandes que ce petit morceau de chair ? Popote du peuple humain, je t’aime toi qui te cherche. Je mets tes phrases dans ma bouche, accouchant de maux en bataille, fébriles et sortis des ombres. Je les laisse traverser l’espace. Je me laisse habiter le vide, des échos pour faillir, délicatesse si fine d’ici m’agenouiller et dire…

L’excrementiel, 2022

Amicale étrangeté, familial étranger, dis-moi… Comment ça va ?

Comment ça va là-dedans ? Tu veux bien t’intimer ? Me parler de tes fesses. Comment elles vont tes fèces ? Timide-moi. Intime-toi. Ebouse-moi. Conte-moi tes chiottes. Parle moi moins de tes petits cacas serrés qui te sortent en ping-pong, narre-moi plutôt ta chiasse intime, ta boue secrète. Ce que ta panse pense. Intestinalement. Parle-moi de cette couleur subtile sur laquelle tes selles ce matin ont œuvrés. Que soutiennent tes fesses ? Quelle voie fécale te sied ? Quels cabinets de curiosités ? Allez va, laissons les sprays lavandes pour les faussaires. Si ton emmerde ment, ce n’est pas une fécalité. Et même, invitons coude à coude nos petits grands coups de bouses, invoquons nos baby bouses jamais nommés. Viens, portons nos diarrhées sur l’autel. Trônes en rue ! Tous unis pour nos petites chieries, adorables confesses… Partons en chiasse, soyons des cherchieurs de vérité, accouchieuses de non-dits ! Osons cette science de parfois se chier dessus, secrète physique colique du trésor des sous-merdes… Tous en selle ! comme dirait l’autre. Offrons-nous le droit d’être bousier charnu, artistanal, professieur de foi, bouseteuse d’étoiles… Merdons ! Formons le coliquetif tant attendu, ébousons-nous tel quel ! Formons la voie du grand colon, fertile et parsemé. Soyons les magiciens de nos grandes commissions. Laissons-nous transiter vers nos transformations…

Je n’ai jamais eu d’attrait pour le caca ni les colons. Et voilà que pourtant.

Je ramasse des crottes. Depuis deux ans je ramasse des tas de crottes. J’en fais des bocaux avec des étiquettes. Petites moyennes grosses. Terroirs d’ici et là. Je vais dans les prés et je cueille ces petits amas de choses noires qui sont sorties du cul des chèvres et du cul des chevreuils. Des petites collines de perles brunes sorties du cul des lapins et du cul des lièvres. Des formes luisantes et sombres d’où l’asticot respire et qui sont sorties directement du cul de la vache et celui du taureau. Je file, j’enfile. J’en fais des chapelets, des parures. J’en fais des portes-joies et des pares-merdes. J’en fais des rideaux et des lampes. J’en fais des plats et des jeux à gratter. J’en ferai des parterres, des coiffes, des combinaisons de ski. J’en ferai des cendars et des panières à salade. J’en ferai tout ce qu’on regarde droit dans les yeux dans la routine parce qu’on en a pas peur. J’en ferai tout le banal qui est dans nos bides et qu’on a trop frayeur de se retourner pour voir la forme que ça a. L’odeur que ça cause. Pourtant à la regarder un temps, la merde, on voit qu’elle fini souvent par faire pousser des fleurs. Même qu’on peut l’arroser si on a pas la trouille.

Bon. J’arrose mes crottes. Depuis deux ans j’amasse et arrose ma propre crotte. Celle qui vient du cœur et de la chair. Elle me sort pas du cul celle-là. Elle me sort en larmes et en poings serrés, en poitrine qui se ferme ou en cri qui hurle. Non, je ne peux pas parler des crottes qui jonchent nos paysages et devant lesquelles honorée je m’agenouille, émue comme on trouverait de bienheureux œufs de pâques, sans parler des miennes propres qui se dorent radieuses dans les soleils restants. Non non, je ne peux plus narrer ma joie sans admirer ma chiasse.

Depuis deux ans je me bouleverse par ma capacité soudaine à dire mon merdier, éteindre ma lumière pour mieux marcher la nuit. Par-delà le jour percevoir l’obscur. Discerner les ombres au-delà des aubes. Disposition fortuite à recueillir des bouses, courir en pieds déshabillés sur les pentes de cailloux et hurler aux feuillages les culbutes ou les freins. Face contre terre. Trouble, fauchée, déconcertée. M’en mettre à volonté la tête dedans la mouise, barbouillée, et me la relever pour en voir sa couleur. Préhistorique et noire au miroir. Dévisagée. Sur le cul. Fameux cul d’or bordé d’abord de nouilles et qui a trop mangé. Tenter de ne plus être que battante et visionnaire, hâtive émerveillée chevauchant les demains. Baisser le bras pour voir. Avoir peur. Être rage enivrée ou chagrin remorqué. Se joindre au passif, au passé, à panser. Par la peau et sans honte prendre risque. Se risquer. S’hasarder à revivre les non vus. Se dévaler. Se faire l’humaine qui peut d’un geste redevenir le nourrisson blessé, regoûter dans sa chair les périlleux appels, extrêmes nécessités d’un bras tendu vers soi. Repliée secourue. Déposer des yeux qui pleurent dans le cou d’une alliée, voir le soulagement d’un simple sol qui porte, recevoir d’un caillou le mot qui a manqué, errer dans les rues d’un chez soi sans se dissimuler. Intrépidement nommer l’amour, au parent ou au cœur devenu ferme. En être l’audace de chier, se chier dessus, être chierie céleste. Chiasse divine.

Surtout ne pas faire mine, ne pas se taire, s’enterrer vivant comme si n’être pas l’heureux bonheur était irrecevable. Ne pas jouer le jeu du semblant, le sanglant masque qui écarte les corps les uns des autres. Assumer la soif ahurie d’oser se voir de face et de front, plonger en abysses, regarder son buste trembler devant l’affront, devant l’épreuve, laisser remonter à soi le point de départ d’une armure. Oser la coulisse. Oser le terrain glissant et la voltige totale. Oser se planter, faire compote. Quand bien même des portes se ferment. Laisser le PQ rose aux effrayés du cœur. Jouir de la plante qui naîtra à force de désir. Désir de se relever de l’épreuve aveugle de devoir chier chaque matin. Se chier le jour ou en chier la nuit. Quoi de plus nécessaire pour manger des fruits sains ? Pas d’engrais pour les aventuriers de l’âme, on a bien du fumier qui nous pousse par l’arrière. Nobles composts. Beaux culs d’or. Demeures de larve à soi, désireuse folle d’offrir sa bonne cuisine à la vaste Terre ferme.

Popote du peuple humain, je t’aime toi qui n’a pas d’avis. Je te fièrement fais mon organique révérence. Je mets tes phrases dans ma bouche, accouchiant de mots en bataille, fébriles et sortis des ombres. Des maux prêts à tous les envers. Je les laisse traverser l’espace. Je les laisser aller à l’oreille. Et là dans ma vue naît le verbe très intime d’autres humains passants. Leur fêlure. Leur mystère. Cet état fou et commun du soupir qui se cherche, que y en a pas de plus ou moins pertinent. A tous, nos vertiges de sauter, volontés de faillir, délicatesses si fines d’ici s’agenouiller et dire j’ai mal… N’est-ce pas pour cette liberté là que nous sommes ici en vie ? Et quoi de plus nécessaire pour bien aimer la vie que d’épauler la mort ? Apprendre. A côtoyer nos troubles. Apprendre. A toucher nos frayeurs sans chercher la chasse d’eau. Apprendre. A voir en retour et devant soi d’amples humains complets. Complets complets complets…

Jardinoise, 2021

Il s’agissait de parler. Savoir que l’on arrive de plus loin, de ce lointain multivers et comme dimensionnel, depuis des chatoiements de vers sortis de poèmes qui ont la parole libre. Dire qu’aussi nous savons, le dessous des choses, le grand cinosh qui se veut vrai, qui se défait en même temps que le vent. J’ai faim. C’est le grand final. J’ai faim de nous voir nous regarder et se dire l’un l’autre par centaine des oh dis, toi aussi tu les vois les formes dans nos yeux, et qui sont des portes vers nos tontons stellaires, cousins sans besoin de forme et qui préparent la popote pour quand on pourra revenir à nous. Et ce nous, depuis l’ici, a été chercher de bonnes épices. Ingrédients. On fait là comme un petit saut en potager pour y relever le goût. Verger terrestre. J’étais bien sûre qu’on était des jardiniers de verre, qu’on se reconnaît au travers mais qu’on en poursuit la récolte. Et entre le verre vide et le verre plein, il y a des arrosoirs qui se remplissent pour la toute fin du jour, de ces heures où le soleil a fait sécher la terre et que racine appelle à boire. J’ai l’arrosoir et j’ai la pelle, les patates poussent. Alors j’ouvre avec vous un tiroir plein de graines et je n’ai pas crainte. Si je regarde bien. Si je me pose, ouverte et pénarde, pour tout bien considérer l’état de ce jardin de nous. Je n’ai peu crainte. Je suis quasi au bord de la piscine avec un cocktail d’avocats. On est bien entourés. On a de quoi avoir la gniaque d’un feu de diou. Tout à la fois qu’à le considérer le sommeil gagne. Me gagne. C’est bien de cela dont il s’agit. Ne pas dormir. Sois pas cossarde, pas trop, ma grande, parce qu’il te reste trois minutes, comme trois grains de petit temps, avec tous humains qu’aussi sommes, pour y changer quelque chose, donner de l’allure à un grand bazar vert qui vire beaucoup au brun. Merde, on a du boucan à redresser. Mais ça n’empêche pas les arbres de donner des fruits, pendant que les tuteurs sont taillés et dressés haut. Et même d’ailleurs que je suis moi-même un fruit du jardin, comme vous autres, et les fleurs, tout à la fois que la main qui les caresse. Si on pouvait s’enlever nos gants, on en sentirait le doux, et on aurait aussi moins gêne de s’en salir les doigts.

Confits sommes, 2020

Plongés dans le noir, on tend les bras pour mieux trouver le chemin, on cherche, on ne fait plus rien à l’aveugle, on voit avec nos yeux vrais. Tendons les mains, sentons le mur, creusons le trou. Y a un passage quelque part. Formons une chaîne. Soyons la pierre qui tombe. Soyons le creux qui se forme, l’enfin réceptacle de quelque chose de véritable. Le sens est arrivé de loin là bas dans le paysage, ce sens là qui éveille. Bras tendus sur tout ce qui nous remet aussi debout. Malgré la tripotée de noeud-noeuds parce qu’il y aura toujours des ronces parmi les roses, avait dit l’autre. Ne les laissons pas nous mettre la merde dans les yeux, tu veux bien ? Relions nous par le dessous. Le dessous est plus vaste qu’on croirait. Plongeons. Là même où tout est plus censé qu’ailleurs et que jamais. Un coup de pied dans la fourmilière. Nord Sud Est Ouest. Vas-y donc la bourrasque, on n’a plus rien à perdre. Laissons la Terre enfin se reposer. Tout le monde au nid. Notre planète se ressource, c’est donc besoin qu’on se taise. Fermons-la un bon coup. Tu veux bien ? Parce que derrière tout ça il y a toujours les bourgeons et les astres qui bougent, les corps qui se meuvent, les artères pleines d’air, les choses plus grandes, tellement plus grandes que cela que nous sommes. Que cela petit que nous pensons être. Plus grandes autour et partout, ces choses nous relèveront. Si on s’y relie. Si on sied surtout. Lors relisons-nous. Revoyons nos coeurs. Elevons-les sans reliques. Le ciel nous voit de plus haut, les mouettes nous regardent. Soyons beaux et dignes pour une fois. Montrons-leur qu’on a changé. Qu’on sera plus jamais pareil. En secret. Au-dedans.

Barbaque, 2020

Et si je fus le grand large de la mer, l’horizon fendant le ciel ou le cœur long d’un mot ? Les vagues aussi, qu’on dirait qu’elles sont comme le dedans de mon ventre, et du vôtre. Ces vagues qui se soulèvent et font le boucan d’un diable. Et voilà même que ce n’est pas le diable. Voilà que c’est un peu comme le gros paquet du grand monde qui serait étalé sur des souches vieilles et mauves, une feuille gorgée d’eau depuis le chaud de moi jusqu’au grand chaud de nous. Nous autres qui sommes tout pareil à un grand tas de barbaque qui se bouge et se bouche les trous du nez pour moins sentir qu’on a la même odeur. Ce qu’on est chacun une aiguille de la montre, parce que y a pas de temps, y a plus le temps de croire qu’il y a un temps. Y a rien qu’un grand tas de nous et qui avançons dans la même direction.

Tuileries, 2020

Être le jeu au jardin. Public jardin. Et tenter de réaliser encore encore encore l’inouïe sensation de l’accomplissement premier, à s’aimer soi depuis partout et de tout son être, ses corps unis surpris dans le petit matin. De se laisser être, là juste là, l’enfant émue et puis la force profonde. Tout du long sur des chaises en fer vert, au creux bouillant d’un parc grand, qu’aucun regard ne tait, qu’aucune présence ne brise. Libérée de la volonté des autres, des troubles idées sur les gens, des désirs d’être choisie. Être juste là fumant, cigarette inventée d’un bâton de saule blond, à aimer voir l’amie qui danse sur les pelouses. Regarder les branches la suivre sans avoir à le dire, les oiseaux sans nom libres de toutes espèces, la tête épousant le ciel, nuages calmes si calmes, l’envol, les tracés d’engins, des langues sorties de soi qui existent d’ailleurs, gestes d’enfant née, fille du soleil et mère de tous les souhaits. Un cri de joie, stupeurs lancés aux toutes petites allées, corps entier débordant, dévoué à ce juste instant précis qui se meut en même temps que le vent. Temps de feu sans forme comme un seul trait s’efface. Une poussée de lait donné à tous les petits du monde. Une mère ressuscitée, la Terre sortie des eaux.

Et dire, 2020

Dire, que l’envers de la Terre en est tout son endroit. Et les tiges ne sont même que d’infinies racines. Qu’il y a là tout un peuple dedans le monde dense. De l’eau du long de l’air, dans un centre évasé. Nous toustes sommes poteaux. Tous les piliers ont des racines. Car nos dedans sont notre endroit. Lors dire surtout, que nous prenons la flotte, buvons les eaux anciennes, devenons un seul fluide. Toutes nos idées l’on déracine. Tout se vide et fait place. Nous buvons pour vider. Et tout ce peuple parle, et nous parle beaucoup. Nous qui sommes deux antennes, la tête enracinée, venus du même mot, retournés aux mêmes lieux. Le grand sommeil s’effondre. De la Terre le grand fond, le travers se répand. Se dissout. Son lavement lui déteint et la peau et les mains. Son cœur d’adolescente prépare une histoire autre, dans un bain d’ondes neuves et des corps épaulés. Là, juste là.

Aux petits perdus, 2019

S’est levé le jour. Crâne chair cœur ont pris le contre-coup des petites heures perdues, droites droites droites. Quand tu prends le sentier chaud du juste découvert, tout souci de te perdre sur des cailloux mouillés, il y a toi et le jour qui font comme deux gouttes d’eau et se posent en ta joue et les planètes ensembles. Toi qui comme mort n’avais pas vu tomber le ciel, la nuit tombée plus tôt que le faisait le jour, parce que voilà ta tête dans tes mains tendres et qu’aussi même tu te mangeais le pouce comme un oiseau sans aile. Ton navire est du jour et reprendra la mer. C’est qu’entre toi et toi, ton sentier est des eaux des ruisseaux de la mer, des pluies douces et du grand large. Alors boire l’eau de tous les torrents et se coucher dessus la pierre. Être la mousse qui se tait et regarde. Oser se taire. Poser ses yeux si chauds sous le très vaste ciel. Etendre des doigts mous sur les cailloux du fleuve. Veiller. Que nous parvienne ici l’arbre plus haut que soi. Son feuillage clair ou roux et puis sa sève brune. Berce là nos entrailles. Touche nos hanche, embrasse nos joies, épouse nos paumes et radoucis nos voix. Porter tout ça dans notre écorce pour nous mettre debout. Ancrés dedans la terre.

Chant libre sous la neige, 2018

Bonjour. C’est le bon jour de la clé des champs, l’athlé du chant libre qui a touché l’hiver. Aleluia. Nous que je suis-je, on veut le vrai hiver, celui qu’avec le cœur chaud. Je peux pas jouer dans le noir, quand tout est coupé, et le jour et la nuit. Un cœur absent est un monde mort. Je suis pas, dans le froid infini. Suis pas, sans l’âme. Pas sans pluie. Petite plante fut malade, à cause que c’était pas sa terre bonne. Bonne terre, t’as cherché dans toi les choses qui font du bien, et la tige a poussé. Tu plantes et pousses à la lumière, toi qui est plus grande que haute et autrement si folle d’esprit de cœur. Les arbrisseaux sont des tiges folles qui se prennent pas pour des chênes mais qui regardent haut. Autrement. Folie pure. La boue est bonne quand elle sustente. La merde est bonne quand elle s’en sort, du fond du bide. La merde sans issus est un arbre mort. Où est passé la récré des merdes mortes? La récré des bidons pleins? L’espace ouvert aux cris aux pleurs aux peurs? Trouve donc ici ce que tu cherches ailleurs. Triture dans toi ce que tu écrases en l’autre. Toi aussi rentre chez toi, reviens à l’hiver chaud et donne toi la terre dont tu as faim. C’est pas dans le bide des autres que tu mangeras mieux. Ca se meurt d’être mangé. Alors ici arbrisseau dit que c’était trop froid là-bas, trop sec, trop saignant bleu à point final et sale. Sans eau, sans air, sans âme. Écrasé haché menu et tout ça mis dans la machine à laver pour te triturer le bout du slip. Arbrisseau veut ça du tout noir bordé de couleurs. C’est ça qu’on donne au monde, pas que des cailloux. On donne des cailloux qui respirent. Nom de Dieu. Un cœur fermé est un monde mort. Ah ça. Suffisait d’un seul pour tuer le monde. Et le cloune sacré n’était pas là, il fut éteint partout là où par miracle il avait su se frayer un chemin. Parce que sans eau sans terre sans air il marche pas droit. Mais le pas droit qui fait qu’il se prend des murs qui ne tombent pas. Bon. Fallait juste passer la porte, il m’a dit le cloune. Arbrisseau passa la porte. Et voilà qu’ici c’est l’hiver et le vrai, celui qu’a le cœur chaud. Du froid bordé de chaleur. Du noir bordé de couleurs. Ici la terre est partout pareille à la vie qui prend vie, la flamme qui se rallume et l’amour qui rapièce les visages déchirés. Et tout ça c’est beau et c’est pas grave. C’est la vie qui nous fait s’éteindre et s’allumer, s’éteindre et s’allumer, s’éteindre et s’allumer, s’étreindre et saluer.

Aux clounes issus du monde, 2018

C’est tout un espace vide, et plein d’air, plein de choses qui sont du vide avec de l’air dedans. C’est tout ça mis ensemble sur un plateau de bambou, avec des gens dedans qui mettent un nez et se dandinent sur des bruits de partout, tout ça vivant ensemble qui fait la fenêtre sur le monde. Secouer fort les petits bidons que nous sommes et laisser résonner, éclabousser, éventer le grand chapiteau qui nous embrasse. Vous êtes grands. Vous êtes pleins. Vous êtes plein du vide rempli d’air qui fait ding dong partout dans le corps. J’aime vous. J’aime vous voir et que y a pas de sens habituel. Vous baillez pas pareil, sur un plateau plein d’air. Je vous regarde pleins de couleurs et je vois. Vois tout doux avec des yeux plus clairs. Quand vous avez la couleur sur la peau, les bras d’orange vêtus, les verts à pois. Pleins de couleurs oui et sauvages et tout comme des passoires qu’on aurait laissé couler l’eau dedans.

Souciance, 2014

Sens cet enfant mystère
Dont tout l’imaginaire
Se voit taillé si tôt

À qui l’on a fait croire
Que lui ôter des mains
N’était que pour son bien

Faisant chaque fois taire
Sa petite voix claire
Qui savait le chemin

C’est lui qui par le cœur
A gardé dans la main
Le doigt de son gardien

Affranchis, 2014

Petits bateaux jugés
Frappés par les rouages
En recherche d’un âge
Qu’un chacun médisait

Dits « fous » loin vous voyez
Et êtes force enfin
De ce présent qui vint
En vos revers de mains

Bascules, 2014

Passant mont aussitôt
De la plaine au plateau
Tant de vues inégales
De visions marginales

Mon voisin ne perçoit
Que son rythme d’exploit
Quand l’étape me manque
Dans cela que je tente

À chacun sien son temps
Une opinion vaut tant
Qu’un goût une saveur
Puisqu’il y en a plusieurs

Vie, 2014

Chacun dit qu’elle est pâle
Délavée par l’ennui
Et nous quitte la nuit
Dés que surgit le râle…

On dit que ses traits froids
Et son grand regard fier
Jamais ne considère
Nos yeux cernés d’effroi…

Et pourtant elle s’affaire
Cette dame attentive
Se fait si créative
Pour nos chaines défaire…

Dédale, 2014

C’est à l’été des mois d’un jour
Étendu là parmi les sourds
Que naquit un peuple d’amour

Demeurée belle amie breuvage
À materner de leur langage
Veillait leur liberté sauvage

Aussi chacun à petit pas
Tenait son cœur à bout de bras
Le pressant fort entre les doigts

Prodige, 2014

Ô grand diou sombre
Dans tes yeux fous
Je vois l’écrin
De ta tendresse

Car au-delà
De tes orages
Il est un cri
Qui m’émerveille

Celui de tes
Enfants sauvages
Qui apparaissent
Au jour naissant

Celui de leur
Dernier instant
Tandis que tes
Mains les protègent